mardi 29 juin 2010

Corée / Uruguay en face du COEX

Un match de foot en Corée, vu d'un oeil occidental, ca a un petit côté de fête nationale coréenne. Surtout quand le pays sus nommé fait partie des 16 dernières équipes en lisse, puisque, dans ce cas bien précis, il s'agissait du 8ème de finale contre l'Uruguay. J'avais suivi les matchs éliminatoires de la Corée (non pas ceux de la France, et on s'en fout royalement!) dans un petit café avec des amis et un peu de bière, rien d'extravagant, puisque majorité de filles et dans l'absolu peu de monde. Certes, mais je dois m'avouer surpris de constater que même le sexe féminin lambda ici semble "possédé" par les joueurs, et chaque action à l'écran, aussi futile soit-elle, déclenche dans l'assemblée des hurlements stridents. Interesting, comme dirait Johnny Depp. Pour marquer le coup cette fois-ci, j'étais censé rejoindre un ami dans le quartier de Gangnam / 강남, plus précisément au COEX : un des centres commerciaux les plus imposantes de la ville, des kilomètres de galleries sous-terraines, un aquarium géant, un multiplex de cinéma, magasins et boutiques en pagaille...j'en passe. Mon ami est bien la. Il vient de LA, est designer de mobilier, et est venu avec sa partenaire de coréen et deux de ses collègues à elle. Je suis curieux de ne pas les voir arborer les couleurs de leur équipe, car cela semble être pri très au sérieux ici. Explications.

La Corée est un pays et fier de l'être. Les coréens ne ratent pas une seule occasion de véhiculer leur image et leur fierté dans le monde. La où en France, on se fiche pas mal de 11 connards, et j'ai franchement pas d'autre mot, poussant nonchalemment la baballe pour une poignée de centaine de milliers d'euros de plus, ici, chaque match voit la ville et les gens changer du tout au tout. On se regroupe par milliers pour supporter  l'équipe, des écrans géants sont mis en place dans les grands espaces, des gens distribuent des goodies en pagaille, des concerts sont prévus à la mi-temps, tout le monde arbore les couleurs officielles de l'équipe : cornes de diable et t-shirts rouges sont de mise, pour supporter leurs 11 Red Devils (붉은 악마 / bulgeun akma), avec leurs fautes d'orthographe en anglais, mais on leur pardonne puisqu'il y en a partout^^ Vu le nombre de gens qui portent ces T-shirts, les vrais gagnants de ce mondial sont ceux qui les fabriquent...


 
Voir rouge...

Ce n'est pas l'intérieur du COEX qui valait le détour cette fois-ci, mais ce qu'il y avait juste en face.


Une des avenues qui structure le quartier. 2x6 voies. Gigantesque. Sans grande surprise, pas une seule voiture. Comment décrire l'endroit? Très difficile avec des mots. Des écrans géants sont montés tous les 100m sur plusieurs centaines de mètres, justement. Devant ces écrans, s'entassent, visiblement depuis des heures (il était alors 20h, le match commencait a 23h...), plusieurs milliers de coréens, assis sur des nappes de picnic en plein  milieu de l'avenue. Evidemment, ce sont les places "VIP", bien en face des écrans de 800 pouces, donc c'est cloturé par des barrières. Franchement, ça a une allure de zoo...un zoo tout rouge. On annonce de la pluie ce soir. Je me délecte déjà en secret de l'image de tous ces gens pris de court par les premières ondées. Mon côté Shadenfreude somme toute.

 On dirait des prisonniers politiques...

Impossible de s'y assoir donc. Oui, même avec 4h d'avance. Qu'à cela ne tienne j'ai un petit creux, et on retourne se réfugier au COEX pour casser la croûte et s'entamer joyeusement avec deux grands pichets de bière. Passons les détails de ce chapitre peu pertinent : manger, boire, faire connaissance avec les demoiselles. Mais bien rigoler avant tout.

On revient une heure et quart plus tard. L'avenue est méconnaissable. Déja, parce qu'il a un peu plu entre temps. Les coréens ne voient plus rouge : des petits malins avaient bien calculé le climat, et vendent des ponchos par milliers. Seulement, ces ponchos sont blancs. Peu importe, les coréens joueront en blanc ce soir. Et trois gouttes de flotte n'entament en rien l'élan de patriotisme général, puisque malgré un sol bien trempé, les gens sont maintenant assis tout le long de l'avenue. Pas seulement des hooligans (y'en avait-il un seul?!) mais des amis, des couples, jeunes ou moins jeunes, des familles...Corée 1 - 0 Pluie.

Un peu de flotte? ^^

Evidemment, la plèbe n'aidant pas, difficile de trouver un bon spot pour regarder le match. Devant les écrans géants? C'est mort. Pas non plus moyen de s'accouder aux rambardes, les organisateurs nous en kickent immédiatement. On finit par acheter une nappe nous aussi, et on s'assoit par terre. J'ai le pire spot du monde, le jean trempé ainsi que les chaussettes, un poteau en plein milieu du champ de vision qui coupe l'écran en deux... Je me mets dans l'ambiance coréenne et ferme mon clapet : on est venu pour supporter les coréens? On va le faire à la coréenne et passer un bon moment.
Dae...han min...kuk! (entammé en coeur et intercoupé d'applaudissement en rythme, de quoi faire trembler toute la ville)

Et le match commence.

 
Poteau de merde...

Super pour suivre le match...:-/


Bon, je ne vais pas m'improviser commentateur de match ici et vous résumer chaque action en la décortiquant tel un Pierre Ménès pédant et snob (et puis toute façon j'avais un poteau qui me gachait la vue), mais les coréens qui courent la sphère au pied déclenchent autour de moi des poussées de hurlements assez surprenantes...sont-elles aussi palpables sur les vidéos qu'en vrai? *EDIT Il semble que la nouvelle version de Blogspot ne permette pas encore de mettre des videos...on verra plus tard donc!* En douté-je. Un gros plan à l'écran sur Park JiSung / 박지성 ou Park JuYoung / 박 주영 (les deux gros buteurs me semble-t-il) déclenchent des montées vertigineuses d'hormones chez ces demoiselles autour de moi.

"- C'est quoi ton problème, c'est juste un joueur de foot?!
- Ouais mais il nous sent dans son coeur quand on l'encourage avec autant de force!"

Effectivement. Mon ironie n'a pas eu raison de la ferveur patriotique. Humour grinçant 0 - 1 Supporter coréenne.

Premier but de l'Uruguay. Contre toute att Très prévisiblement, l'ambiance autour de moi est tuée sur le coup. Evidemment, pour enfoncer le clou, le replay remontre l'action sous plusieurs angles et des râles de déception montent de tous les côtés. Je jette un oeil derrière moi, DaYoung / 다영, qui nous accompagnait, est au bord des larmes. Elle n'encaisse visiblement pas la réalité et je tente de lui remonter le moral en précisant que la Corée gagnerait surement 3-1. La réalité m'aura pourtant donné tort.
Mi-temps. Il continue de pleuvoir, mais il est temps de se dégourdir les jambes. Je retire mon poncho, celui qui recouvrait mes jambes aussi (j'avais l'air fin tiens!), et décide d'aller faire un ptit tour aux toilettes. Je passe les détails, mais la queue était facilement aussi longue que celle d'un rollercoaster à Disneyland un samedi après midi de Juillet...comme j'avais pu l'imaginer, retrouver les copains dans la tourmente ponchotique à mon retour du petit coin ne fut pas aisé; les gens courent dans tous les sens, s'appellent, prennent les niouzes des autres copains qui regardent le match ailleurs, toussa...inutile de préciser, ça s'agite dans tous les sens et je sais même plus où je suis assis. Quelque part en plein milieu de l'avenue...oui mais où? lol
Bref remis de mes émotions, et de retour à ma place (qui entre temps avait pri l'eau sous les ponchos) la seconde mi-temps peut commencer.

Egalisation de la Corée. Je me passerai de texte pour expliquer ca^^

Tout juste remis de nos émotions ici, l'Uruguay en rentre un second. En d'autres mots,  enfonce un peu plus le dernier clou du cercueil psychologique des gens autour de moi. Il doit rester 15-20min pour remonter, mais ca va être dur. Ceci dit, n'entame toujours pas les gens ici qui redoublent de cris dès que les Devils possèdent le ballon, les requadruplent dès qu'une occasion d'égaliser se présente, et elles ne manquent pas : dopés la la fierté, les 11 manquent à plusieurs reprises, sur des actions assez osées, de remonter le score.

On dirait vraiment que les gens sont sapés avec des sacs poubelles...

Coup de sifflet final. Tel un glas au timbre ma foi très aigu, il est suivi de râles d'agonie montant à l'unisson de la plèbe. C'est la fin d'un rêve. D'une épopée de presque un mois. Les experts sportifs prédisaient que la Corée irait bien plus loin. Encore une preuve, et on ne le redira jamais assez : ne jamais croire un expert. Les portables sonnent, les sms volent, les gens tirent des tronches de 20m de long, en bref on veut pas y croire. Rouges jusqu'au bout, ces coréens... Moi même, je dois reconnaitre qu'il la méritaient leur victoire. Je n'avais jamais vu un peuple derrière son équipe à ce point, et une équipe défendre les couleurs de son pays avec autant d'ardeur et d'investissement.

Mais les entendez-vous? Non? Parce qu'il n'y en a pas. Pas de sirènes de police. Ici les gens perdent, mais pas d'émeutes. Pas de passages à tabac (pour mieux digérer la défaite) du petit binoclard qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment, pas de voitures en feu, pas de casse. En d'autres mots : la France, très peu pour moi les soirs de défaite.Le lendemain matin en me levant, l'ambiance était retombée. Les gens sont fiers de leurs diables rouges, mais c'est fini. Il se sont bien battus, mais n'étaient pas encore au level, et les coréens ont fait leur deuil immédiatement.Comme je disait plus haut, c'est la fin d'un rêve. Les écrans sont démontés, les ordures débarrassées, les t-shirts rangés au placard. Les vendeurs de ponchos vont devoir se reconvertir. Tout le monde va devoir passer à autre chose. Et moi, je sens que l'ambiance au taf lundi matin va être bien morne.

A dans 4 ans.

Et pour finir, quelques exemples de Konglish comme on en trouve partout...

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